Lecture : 5 à 10 minutes.
Voyage en terre inconnue
L’oxygène me manquait dans le vide qui s’était créé. Il me fallait partir, mais où ?
Brume de l'esprit
Noël arrivait à grands pas et j’étais enfin libéré de toutes mes obligations. Mon travail de Bachelor était enfin terminé et j’avais reçu la belle note de 5,5. J’en étais certes très satisfait, mais pour être honnête, la note m’importait peu. Je voulais juste en finir. Les fêtes de fin d’années ne me réjouissaient guère, j’aurais voulu que le temps s’arrête et qu’on me laisse tranquille. Sauf que le temps ne s’arrête pas, et il aime nous le rappeler.
Depuis plusieurs mois j’essayais d’aller à contre sens. Je voulais être libre, je savais ce qu’il me fallait faire mais paradoxalement je ne faisais rien. Chaque petite tâche de la vie m’était insupportable et j’aurais pu passer mes journées à dormir si ma conscience avait bien voulu arrêter de jouer avec ma culpabilité. Oui, j’en étais conscient. J’étais négatif, fatigué, affaibli et rester dans mon lit ne m’aidait pas du tout. Le problème, c’est que j’étais atteint de la pire des maladies qui soit, et cette maladie on l’a tous. Elle vient frapper à notre porte sans prévenir, justement quand on voudrait tout, mais vraiment tout, sauf l’avoir dans nos pattes. A chaque fois qu’elle revient, on a tous des stratégies différentes pour faire comme si elle n’était pas là, sauf qu’aucune ne fonctionne, car elle est patiente et maligne. Elle attend que nos pensées se calment, en général le soir avant d’aller dormir, pour venir chuchoter à notre oreille de sa petite voix: « à quoi bon ».
J’étais en quête de sens. Ce sont parfois des choses qui arrivent quand on place son énergie et son attention dans quelque chose puis que celle-ci part en fumée, quand une personne qui nous est cher disparait, ou encore parfois simplement comme ça, alors que l’on est assis sur un banc à contempler un beau paysage.
La seule idée qui me parlait vraiment c’était de partir. Tout quitter, pour essayer de tout recommencer. C’est ainsi, alors que je faisais part de mes envies de voyage à l’une de mes meilleures amies (ce genre de personne qui peut écouter votre exposé sur le fait de partir plutôt en Finlande ou au Cambodge pendant des heures alors que vous ne tiendriez même pas 5 minutes si l’on vous enregistrait) qu’elle me proposa quelque chose qui me sembla tout d’abord être une blague : « si tu veux, je peux me charger de te réserver un vol et te préparer un petit voyage à quelque part sans que tu saches où tu partiras». J’en ai ri, puis l’idée s’est ancrée étrangement rapidement dans ma tête, comme une rebelle qui luttait contre mes autres pensées. J’avais tout de même envie de choisir certaines choses dans mon voyage, je ne voulais pas qu’on choisisse tout pour moi et être coincé dans un lieu que je n’aimerais pas me serait insupportable. Puis alors qu’on se disait au revoir et que je rentrais chez moi, les pensées évoluèrent. C’était une occasion rêvée d’être livré à soi-même. Partir seul vers l’inconnu. C’était une sorte de ticket de sortie, une confrontation avec la petite voix qui maltraitait mes nuits. De plus, c’était aussi une belle leçon de vie : peu importe où j’irais, je devrais laisser mes peurs et mes préjugés à la maison. En fait, c’était exactement ce qu’il me fallait : tout quitter, partir seul, sans que personne ne puisse savoir où j’irais avant d’y être moi-même. Une déconnexion totale, sans contrôle. Un silence d’or.
Je pris mon téléphone et écrivis à mon amie. Plusieurs messages après lui avoir transmis ce que j’attendais de mon voyage, après lui avoir donné pleins de pistes et d’endroits où j’aimerais bien me rendre en expliquant pourquoi (vous voyez l’anxiété qui s’insinue gentiment et la tentative de garder le contrôle ?), je lui dis que c’était d’accord. Elle pourrait choisir où elle voulait m’envoyer, peu importe où dans le monde, pendant 2 semaines.
J’étais engagé et je ne voulais plus faire marche arrière. L’anxiété avait fait place à l’excitation, et la petite voix dans ma tête s’était tue. Désormais, je voulais que le temps accélère pour partir au plus vite.
Baluchon
Les fêtes passèrent avec leur lot de surprises. Ma destination avait été choisie, l’avion réservé et je ne savais toujours pas où j’irais. J’occupais mes journées par un peu de travail pour l’argent et je tâchais de m’entraîner physiquement pour pouvoir affronter n’importe quelle situation. Mais je tournais un peu en rond. Je refusais aussi de trop me divertir. J’aime m’amuser, aller à un concert, boire des verres, cependant l’exagération du divertissement ne mène à rien.
Enfin, tout le monde convient qu’un homme occupé ne peut rien mener à bien, ni l’éloquence, ni les arts libéraux, puisqu’un esprit distrait ne reçoit rien en profondeur, mais rejette tout, comme si on voulait le gaver
Il y avait une certaine forme de lâcher prise dans cette attente. Je réalisais l’aventure que j’allais vivre. C’est donc avec sérénité que je me préparais. Mon sac à dos, vide, reposait sur le parquet de ma chambre. Il serait mon compagnon de route pour les jours à venir, aussi me chargeai-je de lui faire honneur. J’avais acheté une nouvelle paire de chaussure, de la corde et un mousqueton… parce qu’on sait jamais. Un carnet de voyage et un stylo étaient prêts pour recueillir mes ressentis. Mon intention était de voyager léger au cas où je devrais beaucoup marcher, j’avais donc limité les vêtements et banni tout ce que je trouvais lourd. Ce tri était aussi une leçon en soi : apprendre à partir sans toute la baraque. Au pire, je trouverais sûrement ce dont j’avais besoin là-bas.
Le poids de mon sac était en premier de 8 kg. Puis, je craquai pour prendre un livre plutôt gros, quelques autres babioles, ainsi que des vêtements supplémentaires, résultat : 10 kg. J’étais fier de moi.
Je pouvais aller regarder Rendez-vous en terre inconnue tranquillement.
Envol
Le jour J arriva. J’avais passé beaucoup de temps à lire pour occuper mon esprit. Un livre en particulier m’avait beaucoup plu : De nombreuses vies, de nombreux maîtres de Brian L. Weiss. Ce psychiatre américain, par son témoignage, amène une réflexion intense sur la mort et le sens de notre vie.
C’est toujours avec calme que je quittai mon chez moi, cela faisait longtemps que je ne m’étais pas senti aussi léger. Mon amie m’attendait dans sa ville puis m’amènerait à l’aéroport, là où elle me dévoilerait ma destination. Je pris donc le train vers chez elle, avec Three de Sleeping At Last dans les oreilles, qui suivait le Two et le One, of course.
C’était une belle journée. Au final on eut le temps de manger des pâtes au saumon et de jouer avec son chat. J’avais envie de savoir où j’irais, mais en même temps je n’étais plus aussi pressé. Je prenais les choses comme elles se présentaient car je ne pouvais plus me préparer, je ne pouvais plus anticiper. J’étais dans l’instant présent et c’était bien.
Mais nous arrivâmes bel et bien à l’aéroport. C’était le moment de se dire au revoir, de prendre mon sac et d’avancer. On était devant le panneau d’affichage des vols et j’essayais de deviner où j’irais.
– Hmmm, Amsterdam ? Londres ? Non vraiment je ne sais pas…
– Ton vol est bien là pourtant, me rétorqua-t-elle.
– Il faut que je les dise tous ? Il y en a que je connais même pas, Doha par exemple, c’est où ça ?
– C’est là où tu vas.
– Quoi ?!
Elle m’expliqua alors que ce n’était qu’une escale, que Doha, c’était au Qatar. Je commençais à rire de nervosité, je me rendais compte que je n’avais vraiment aucune idée de l’endroit où j’allais partir dans quelques minutes. Je n’avais absolument rien pu anticiper de ce qui allait arriver.
Elle sortit alors une petite enveloppe qui contenait une feuille avec la destination finale écrite dessus. Elle s’amusa à la glisser lentement hors de l’enveloppe bien entendu.
– Tu iras… au
…
…
La suite au prochain épisode. 😉
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L’humour est incroyable… Aller :
Sri Lanka ☀️
Ce qui se passa ensuite fut plus rapide que l’éclair. J’eus un cocktail explosif d’émotions différentes. De la joie pour le soleil que je voyais sur la feuille et qui serait au rendez-vous ! De la peur mélangée à de l’excitation parce que le Sri Lanka c’était au sud de l’Inde et que c’était une culture totalement différente. J’étais un peu en état de choc car j’avais désormais la dernière pièce du puzzle pour réaliser pleinement que je partais. Et je partais tout bientôt d’ailleurs. Nous nous rendîmes au check-in, mon sac disparut au milieu des autres bagages qui transitaient sur les tapis roulants et puis voilà que je me trouvais déjà devant les services de sécurité pour passer « de l’autre côté ». Je remerciais en boucle mon amie qui avait pris le temps de me faire un beau dossier avec toutes les informations nécessaires à mon voyage, et qui avait aussi acheté un guide Lonely Planet sur le Sri Lanka afin que je puisse le lire dans l’avion. Franchement, elle assurait.
Les au revoir passés, je me retrouvais seul, un billet d’avion à la main, pour partir très loin d’ici. Ce n’est que lorsque l’avion passa au-dessus des Alpes que l’état de choc se dissipa. J’avais bel et bien été propulsé dans une aventure qui promettait d’être des plus incroyables.
La suite dans de potentiels futurs articles !
Commentaire sur “Voyage en terre inconnue”
Waouh un vrai récit et on attend la suite avec impatience. suis fière de mon fils et J apprends encore et encore à le découvrir sur son nouveau chemin de vie. Bravo pour ton courage, audace et progrès sur la découverte de soi et autres…
Continue sur ce chemin et tu trouveras ce que tu cherches… c est ce que je te souhaite de tout mon coeur. Ta mutti.